Les bétons de fibre (5/8) – Comportement de l’interface fibre matrice

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Le comportement du composite est intimement lié aux phénomènes en présence au niveau de l’interface du matériau composite. La réponse de celui-ci dépend des caractéristiques dimensionnels, des caractéristiques mécanique de la matrice et bien entendu des sollicitations extérieures. L’interface fibre matrice présente des similitudes avec les caractéristiques de l’interface pâte granulat dans le sens où la porosité y est plus élevée. On observe également une concentration plus importante de Portlandite (CH).

L’adhérence au niveau de l’interface est définie lorsque qu’il y qu’une interaction moléculaire entre les deux surfaces (liaison chimiques faibles, force de Van der Waals ).

Observations

Lorsqu’une fibre présente dans une matrice une interface faible, la fissure matricielle génère une longue décohésion à la surface des fibres. En ce qui concerne la matrice cimentaire renforcée de fibres métallique, l’ interface peut être qualifiée de forte. Les fissures matricielles sont déviées au niveau de l’interface ou sont observés de nombreux rebranchements. Les fissures se propagent dans le matériau en contournant les renforts au niveau de l’interface.

Ces observations sont présentées par [A.Bentour, 1985]. L’étude de la configuration spatiale des fibres par microscopie électronique a été réalisée avec des sollicitations parallèles aux fibres.

Ces études montrent également que la zone de béton toute proche de la fibre (200 micromètres à 1000 micro mètres) présente une décohésion et une microfissuration très élevée. Ce comportement se retrouve d’ailleurs dans l’études de certain composites céramiques pourtant différents d’une matrice cimentaire. [A.Bentour, 1985] conclu également que la simple considération de déviation de la fissure ne donne qu’une description idéalisée et que l’hétérogénéité de la zone d’interface est en partie responsable des observations de fissures multiples et de trajectoires de fissure variées. Les observations semblent donc plus complexes à interpréter qu’on pourrait à priori le supposer.

Le pontage des fissures

L’ouverture de la fissure au niveau de la matrice représente la réponse du matériau aux sollicitations extérieures. Comme on l’a vu précédemment, Les fissures sont tout d’abord diffusent au sein de la matrice, avant de grandir puis de se regrouper et de former des macrofissures.

Nous avons dans le paragraphe précédent expliqué les observations relatives à la rencontre entre une fissure et une fibre. La fissure va continuer de se propager à la rencontre d’autres interfaces fibres- matrice.

Lorsque la fissure est située dans le plan perpendiculaire à la fibre et à la sollicitation extérieure. L`ouverture de la fissure, suite à l’accroissement des sollicitations extérieures, est contrôlée par une fraction de fibre qui assure le transfert de charge. Ces fibres sont d’autant plus chargées que les lèvres de la fissure s’écartent. Le mécanisme de pontage réduit fortement l’intensité des contraintes en fond de fissure matricielle, ce qui caractérise l’action composite .Si l’on considère une analyse des contraintes on montre que la contrainte au niveau de la pointe de la fissure est minimisée par la mobilisation de la fibre. Ce pincement connu sous le nom de pincement de Romualdi [Romualdi, 1964], s il est suffisant, peut arrêter la fissure. Dans le cas contraire la fissure continue de se propager, en contournant la fibre, ce qui explique les observations mentionnées dans le paragraphe précédent.

Figure 11 – Contrainte de cisaillement le long d’une fibre

Si l’on analyse le phénomène du point de vue énergétique, L’énergie transmise par les charges extérieures est dissipée une première fois dans la matrice jusqu`à ouvertures des fissures. Une grande partie de l’énergie restante est dissipée grâce à la microfissuration de l’interface que nous avons évoqué précédemment. Les fibres métalliques qui sont mobilisés progressivement, apportent au matériau sa ductilité en dissipant de l’énergie par mobilisation du frottement à la surface de celle-ci.

Le mécanisme de pontage permet la dissipation de l’énergie transmise dans le matériau,comme le montrent plusieurs articles consultés. On peut observer ci-dessous un image au microscope électronique [A.Bentour, 1985] llustrant la déviation de la fissure et la micro fissuration au niveau de l’interface.

Figure 12 – Arrêt d’une fissure par une fibre

Suite à ces explications, on serait tenté de croire que plus l’interface est forte, plus la résistance à la propagation des fissures est grande. En réalité, il faut considérer un autre phénomène. En effet si l’interface est trop forte, la fissure pourrait se propager en ignorant le renfort (la fibre). 

L’effet de la présence des fibres serait minimisé et le composite pourrait mal réagir aux sollicitations importantes. Cet effet s’ajoute à celui décrit en 2.1.1. 

L’effet Cook-Gordon 

Si l’on considère une fissure perpendiculairement à la direction principale d’une fibre tel qu’illustré ci-dessous, il est possible d’établir une relation entre les paramètres dimensionnels de la fibres et le comportement en fissuration. Les articles que nous avons analysés font mention d’un mécanisme connu sous le nom de mécanisme de Cook et cordon. L’utilisation a permis selon [LI 1993] d aider à prédire une relation contrainte ouverture des fissures au niveau de l’interface fibre matrice.

Considérons une fibre isolée et une fissure proche de l’interface. Lorsqu’une fissure se propage dans la matrice cimentaire et atteint la zone proche d’une fibre, une ouverture se forme au niveau de l’interface. Par la suite la fissure progresse brusquement et se retrouve liée à la cavité verticale de dimension delta comme le montre la figure ci dessous. Cette dimension est appelée paramètre de Cook Gordon. L’auteur de l’article précise que ce phénomène a pour conséquence l’augmentation de la largeur de la fissure perpendiculaire à la fibre. Il est intéressant de remarque que l’hétérogénéité et la porosité au niveau de l’interface joue un rôle important dans l’ouverture de la fibre et donc dans la mobilisation de la fibre, comme cela a été évoqué dans les paragraphes précédents.

Figure 13 – Schéma de principe Cook-Gordon

Modélisation du comportement post fissuration de la fibre

La condition de déviation d’une fissure par une interface repose sur le mécanisme de Cook Gordon et sur la répartition des contraintes dans le fond de fissure. Une analyse aux éléments finis permet en considérant une cellule élémentaire constituée de deux matériaux (béton et fibres) d’évaluer la résistance de l’interface à la  rupture en fonction des modules d’élasticités des constituants. En comparant les résultats obtenus par expérimentation en laboratoire, on a pu comprendre les relations entre la largeur des fissures et la contrainte. Le but à terme est de savoir exactement prédire la quantité de fibre nécessaire à la bonne transmission des charges entre fibre et matrice cimentaire.

Nous présentons dans ce paragraphe les résultats de [Henrik, Stang et Li, 1995] sur le comportement en chargement uni axial d un béton de fibre. Il a été pris en considération dans ces études, le phénomène de  pontage des granulats, des fibres que nous avons décri précédemment, et le mécanisme de Cook-Gordon.

On recherche la valeur de la contrainte transportée par la fissure qui est reprise par la fibre. La contrainte se décompose en une contrainte de pontage des granulats, une contrainte de pontage des fibres et une contrainte « élastique » venant du fait que la fibre est déjà soumise à une contrainte élastique lorsque la première fissure se forme.

L’article conclu que pour un taux de fibres égal à 2% et pour des ouvertures de fissures limite de 0.3 mm, les paramètres de L et d sont prépondérants. La compréhension de l’ouverture des fissures et de l’action des  fibres est améliorer car la prédiction des modèles semble refléter les résultats d’expériences présentés dans les articles.